Texte inspiré par Stéphane Malgorn du Dojo Saint Germanais
C’est une question légitime de désirer une ceinture, cela flatte l’égo et récompense le pratiquant.
Le passage d’un grade, illustré par les différentes couleurs de ceinture, n’est pas une fin en soi mais représente le parcours effectué. Elle donne une indication visuelle pour son partenaire qui saura adapter son niveau et inversement.
La ceinture, prononcée Obi (帯) en japonais, revêt une importance particulière dans le judo et des arts martiaux en général. Pour certains, elle est une motivation et la représentation d’un niveau technique, alors que pour d’autres, elle ne sert qu’à tenir la veste du judogi.
Quoiqu’il en soit, c’est un élément important qui distingue les arts martiaux des autres disciplines. Est-ce donc vraiment qu’un simple bout de tissus ? Pas si sûr…
Bien que l’on sache que les ceintures de couleurs sont une invention du fondateur du Judō, Jigorō Kanō, on ne connaît pas la date exacte de leur création.
Si le système des couleurs existe depuis un long moment, il était bien différent de ce que nous connaissons actuellement.
Sa méthode de graduation appelée Kyu-Da-Ho dissociait 2 groupes, les Kyū et les Dan :
- Les Kyū (級) représentaient les ceintures des premiers niveaux dont les grades étaient classés par ordre décroissant. Kyu peut se traduire par catégorie ou position.
- Les Dan (段) représentaient les ceintures arrivant après les Kyū. A l’inverse, des Kyū, les Dan sont classés, par ordre croissant. Le terme « Dan » peut se traduire par degrés.
Ainsi, en 1913, les Kyū étaient au nombre de 5, répartis-en 2 couleurs de ceinture. La ceinture blanche (5ème et 4ème Kyū) et la ceinture marron (du 3ème au 1er Kyū) pour les adultes. Les jeunes pratiquants portaient une ceinture violette à la place de la ceinture marron. Plus tard, un sixième Kyū fut ajouté à la ceinture blanche.
Les Dan, quant à eux, sont aux nombres de 10. Il n’y avait normalement pas de plafond mais Kano n’ayant pas attribué de son vivant de ceinture allant au-delà du 10ème Dan, c’est la limite qui est encore usité de nos jours.
Dans un premier temps, ils sont répartis en 2 couleurs : la ceinture noire (1er au 9ème Dan) et la ceinture rouge (10ème Dan et au-dessus).
Le fondateur du judo, Jigorō Kanō a été élevé au grade de 12ème Dan à titre posthume, matérialisé par une ceinture blanche large, afin que personne ne puisse le dépasser.
Le 11ème Dan ne peut donc pas être attribué.
C’est après 1931 qu’une troisième couleur apparaît : la ceinture rouge et blanche pour les grades de 6ème à 9ème Dan inclus.
Après une réforme en 1943, les 9è
me Dan furent autorisés à porter la ceinture rouge mais elle devait être portée uniquement lors les cérémonies officielles.
Une distinction était faite en fonction du genre du porteur de ceinture. Même si les ceintures portées par des femmes étaient de mêmes couleurs que celle des hommes, elles arboraient néanmoins une ligne blanche médiane (d’1/5e de la largeur imposée par le Kōdōkan jusqu’en 1999). En 1999, la Fédération Internationale de Judo (FIJ) interdit l’utilisation de ces ceintures en compétitions internationales.
Pourtant, elles sont encore portées dans les dōjō au Japon. Les raisons de cette distinction demeurent inconnues mais Yves Cadot propose quelques théories dont celle-ci, qui me parait digne d’intérêt.
« Les filles n’ont pas eu le droit de faire des shiai (compétition) au Japon jusque dans les années 1970 ».
« Or, pour les garçons, c’est au travers du shiai que l’on obtenait le 1er dan. C’est donc par un examen
« technique » que les filles ont passé leurs Dan jusque dans ces années. Rappelons que la section féminine du Kôdôkan date de 1926 et que la première 1ère Dan, Kosaki Kaneko (1908-1996), a obtenu son grade en 1933 et ce serait pour différencier le mode d’obtention (en shiai = ceinture noire / en technique = ceinture noire avec ligne blanche) que cette marque aurait été mise en place.
Si Jigorō Kanō a mis en place le système d
e couleurs, il n’a jamais justifié le choix de celles-ci. Différentes explications et théories ont été proposées mais aucun document solide connu ne peut à ce jour les confirmer.
Voici ce que dit Jigorō Kanō à propos du système de grade :
« J’ai fondé le Kôdôkan en l’an 15 de Meiji (1882) et j’ai fixé les grades des pratiquants sans tarder.
Autrefois, en fonction des habitudes, le nombre de grades différait, pour chacun, on se voyait remettre des rouleaux aux noms divers mais, en général, il existait trois grandes divisions qui étaient Mokuroku, Menkyo et Kaiden.
Je ressentis qu’il y avait trop de temps entre chacune pour que cela soit d’une quelconque aide sur le plan de la motivation des pratiquants.
Alors, je baptisais les débutants Mudan-Sha (personnes sans Dan) que je séparais en trois divisions, Kô, Otsu, Hei et je mis sur pied un système dans lequel on devenait 1er Dan après une certaine progression dans la pratique puis 2e, 3e, 4e dan et ainsi de suite vers le haut, en faisant en sorte que le 10ème Dan soit attribué aux personnes qui, dans l’ancien système, auraient atteint le niveau Kaiden.
Par la suite, je ressentis encore qu’avec mon système des trois étapes Kô, Otsu et Hei pour les personnes sans Dan, le temps était toujours trop important entre deux pour les motiver, et je réformais le système en instaurant un 1er, un 2ème, un 3ème, un 4ème, un 5ème Kyû ainsi qu’un non-grade, ce qui correspondait à six Kyû.
En y réfléchissant avec l’expérience acquise depuis, je pense que cela correspond assez bien aux besoins. » Traduction du japonais par Yves Cadot.
C’est en 1926 que Gunji Koizumi inventa les ceintures de couleurs d’aujourd’hui. Il est considéré comme le père du judo britannique, fondateur de la British Judo Association (BJA) et du premier dojo en Europe. Elles apparaissent de manière officielle sur les comptes-rendus du Budokwai Londre en 1927.
En Suisse, la fédération suisse de judo (FSJ) est seule habilitée à organiser des sessions d’examens pour l’obtention d’un Dan.
L’automne dernier, deux de nos membres ont brillamment réussi leur examen et sont dès lors, titulaire du 1er Dan. Il s’agit de Maud Althaus domiciliée à Cortaillod et de Jenny Reichenbach citoyenne de Neuchâtel. Toutes deux se sont préparées avec grand soin pour cette échéance, couronnée de succès et qui nous apporte une légitime fierté.
Nos accueillons avec plaisir toutes celles et ceux qui souhaitent nous rejoindre et effectuer leurs premiers pas au judo, renseignez-vous sur notre site Internet www.judo-cortaillod.ch
Stéphane Guye
Directeur général Judo Club Cortaillod-Neuchâtel